Almamy Bokar Biro Barry

Almamy Bokar Biro Barry
Prénom
Almamy Bokar Biro
Nom
Barry
Date de décès
Pays de naissance
Guinée

Almamy Bokar Biro Barry (mort le 18 novembre 1896) fut le dernier souverain indépendant du Fouta-Djalon, dans l'actuelle Guinée. Membre de la faction Soriya, il accéda au pouvoir en 1890 à l'âge de 38 ans après avoir assassiné son frère aîné. Son règne fut marqué par une forte instabilité politique et une résistance acharnée contre la colonisation française. Décrit comme un homme bien bâti au visage impressionnant, il était réputé pour sa bravoure au combat.

Malgré les divisions internes et les pressions coloniales, il refusa obstinément de céder la souveraineté du Fouta-Djalon aux Français, allant jusqu'à écrire "Bismillah" au lieu de sa signature sur un traité de protectorat. Il mourut en héros de la résistance africaine après la bataille de Porédaka, où son armée fut vaincue par l'artillerie française. Traqué jusqu'à Botorë, il fut tué le 13 novembre 1896, et sa mort marqua la fin de l'indépendance du Fouta-Djalon, qui devint un protectorat français.

A lire dans cet article

Bokar Biro Barry, également connu sous le nom de Boubacar Biro, fut le dernier souverain indépendant de l'imamat du Fouta-Djalon, dans l'actuelle République de Guinée. Son règne tumultueux et sa mort héroïque marquèrent la fin d'une ère d'indépendance pour cette région d'Afrique de l'Ouest.

Contexte historique et politique

Le Fouta-Djalon était un État théocratique fondé en 1725 par Karamokho Alfa à la suite d'un djihad, et consolidé par son successeur Ibrahim Sori. Cette fédération de neuf provinces était dirigée selon un système unique d'alternance du pouvoir entre deux factions politiques : les Alfaya et les Soriya, descendants respectifs des deux premiers dirigeants. Le titre d'almamy (chef de l'État) alternait entre les candidats de ces deux factions.

À la fin du XIXe siècle, le Fouta-Djalon se trouvait au cœur des convoitises coloniales. Les Français, devenus la puissance dominante dans la région, s'impatientaient face à l'hostilité de cet État, particulièrement en raison de son soutien à l'empire wassoulou de Samory Touré, autre grand résistant à la colonisation française. En 1889, les Britanniques reconnurent officiellement le Fouta-Djalon comme appartenant à la sphère d'influence française, bien qu'ils continuèrent à verser des subventions à l'État jusqu'en 1895.

Ascension au pouvoir

Né vers 1852, Bokar Biro appartenait à la faction Soriya et avait sa base à Timbo, la capitale de la fédération. Son accession au pouvoir fut marquée par la violence : après la mort de l'Almamy Ibrahima Sori Dongolfella en 1890, le conseil des anciens choisit le frère aîné de Bokar Biro comme souverain. Mais Bokar Biro, alors âgé de 38 ans, s'empara du pouvoir par un coup d'État, assassinant son propre frère, Alpha Mamadou Pathé.

Les descriptions de l'époque le dépeignent comme un homme bien bâti, dont le visage prenait une expression redoutable dans les moments de colère. Il s'était forgé une réputation de bravoure lors des combats menés aux côtés de son père, l'Almamy Oumar.

Un règne instable

Le règne de Bokar Biro fut caractérisé par une constante instabilité politique. Il dut faire face à plusieurs défis majeurs : les luttes entre les factions Alfaya et Soriya, les tentatives d'autonomie des provinces de Labé, Timbi et Fougoumba, et l'exode des esclaves et des gens libres vers les territoires sous contrôle français, considérés comme moins oppressifs.

En juillet 1892, il fut contraint de céder temporairement le pouvoir à Amadou de la faction Alfaya, avant de le reprendre en juin 1894. Sa politique autoritaire poussa certains chefs à solliciter l'aide des Français pour le renverser. Le 13 décembre 1895, il subit une défaite à Bantignel face aux chefs mécontents menés par Modi Abdoullaye Dhokhiré, mais parvint à s'échapper. Après plusieurs semaines de disparition, il réémergea au Kébou et, avec l'aide du chef de la province de Timbi, réussit à retourner à Timbo. Il rassembla une nouvelle armée de 1 500 hommes et vainquit ses ennemis le 2 février 1896.

Résistance à la colonisation française

La relation de Bokar Biro avec les Français fut marquée par une profonde méfiance et une résistance active. Fin 1894, les Français envoyèrent Raoul de Beeckman comme représentant pour négocier un traité. Les tensions s'accrurent après un incident où l'administrateur français attaqua le village de Nanso sans autorisation.

Bokar Biro accusait les Français de plusieurs actions hostiles, notamment la suppression du commerce des esclaves avec le Soudan et le refus de renvoyer les esclaves fugitifs. Il se méfiait particulièrement des visites d'agents français prétextant des études topographiques, qu'il considérait comme des préparatifs d'intervention militaire.

En mars 1896, lors d'une nouvelle tentative de négociation, Bokar Biro fit preuve d'une résistance subtile : contraint de signer un traité avec les Français, il inscrivit "Bismillah" (au nom de Dieu) à la place de sa signature, invalidant ainsi le document. Cette action démontrait sa détermination à préserver l'indépendance du Fouta-Djalon.

Les derniers jours

Après le retrait temporaire des troupes françaises, Bokar Biro adopta une politique ouvertement anti-française. Refusant de céder ses fonctions à la fin de son mandat en avril 1896, il précipita le pays vers une quasi-guerre civile. Les Français décidèrent alors d'intervenir militairement, projetant de diviser le Fouta-Djalon en petits États clients.

La bataille finale eut lieu le 13 novembre 1896 dans la plaine de Porédaka. Malgré sa bravoure, l'armée de Bokar Biro fut décimée par l'artillerie française. Après la défaite, il tenta de rejoindre Sokotoro mais, épuisé et affamé, arriva à Botorë après trois jours de marche sans chaussures.

La mort héroïque

Les circonstances précises de sa mort, relatées par les traditions orales de Botorë, révèlent les derniers moments de sa vie. Caché près du marigot Silikarë, il fut découvert par ses poursuivants. Selon les témoignages, il fit preuve de dignité jusqu'à la fin : après avoir fait ses ablutions et prié, il remit ses talismans à un Sofa de Samory Touré, prophétisant que le Fouta serait soumis à l'impôt colonial. Il fut finalement tué par le guerrier Sita Bendougou le 18 novembre 1896.

Les habitants de Botorë s'opposèrent initialement à la décapitation de son corps, mais les guerriers l'exhumèrent après son enterrement et emportèrent sa tête au commandant Beckman à Timbo. Sa tombe, mesurant environ 5 mètres, existe toujours à Botorë, où elle fait l'objet d'un respect particulier de la part des populations locales.

Héritage

La mort de Bokar Biro marqua la fin de l'indépendance du Fouta-Djalon. Les Français établirent leur protectorat, et en juin 1897, Ernest Noirot devint administrateur, lançant un programme d'élimination de l'esclavage. En 1904, les Français supprimèrent le pouvoir des chefs traditionnels, et en 1905, ils arrêtèrent Alpha Yaya, le rival de Bokar Biro, l'envoyant en exil jusqu'à sa mort en 1912.

Aujourd'hui, Bokar Biro est considéré comme l'une des grandes figures de la résistance à la pénétration coloniale en Guinée, aux côtés de Samory Touré. Son règne, bien que controversé, témoigne de la complexité des dernières années d'indépendance du Fouta-Djalon, entre luttes internes et résistance à la colonisation. Sa tombe à Botorë reste un lieu de mémoire important, où les populations locales perpétuent son souvenir à travers des rituels et des prières.