Sékouba Konaté est un militaire et homme d'État guinéen né le 6 juin 1964 à Conakry. Issu d'un milieu modeste, il intègre l'armée guinéenne dès 1985 et gravit progressivement les échelons grâce à une solide formation, notamment à l'étranger. Surnommé le "Tigre" pour sa férocité au combat, Konaté s'illustre dans des opérations aux frontières avec le Liberia et la Sierra Leone au début des années 2000. Nommé commandant du prestigieux Bataillon des troupes aéroportées en 2008, il est l'un des instigateurs du coup d'État qui renverse le président Lansana Conté la même année.
Propulsé à la tête de l'État en 2009 après avoir pris ses distances avec la junte sanguinaire de Moussa Dadis Camara, Konaté se voit confier la lourde responsabilité d'organiser la transition démocratique. Malgré son inexpérience en matière civile, il parvient à mener son pays vers les premières élections libres et démocratiques en 2010. Cet exploit, réalisé avec pragmatisme et intégrité, lui vaut les éloges de nombreux dirigeants africains et occidentaux. Désintéressé par les avantages du pouvoir, Konaté privilégie ensuite un retour discret à la vie civile, incarnant un modèle rare de leadership sobre au service de l'intérêt supérieur de la nation.
Introduction
Sékouba Konaté est une figure emblématique de l'histoire récente de la Guinée. Militaire de carrière, il a joué un rôle clé dans la transition démocratique du pays après des années de régime autoritaire. Né le 6 juin 1964 à Conakry, Konaté a gravi les échelons de l'armée guinéenne jusqu'à devenir l'homme fort du régime de transition en 2009, avant de superviser l'organisation des premières élections libres en 2010. Son parcours atypique en fait un personnage fascinant, respecté par de nombreux dirigeants africains et internationaux pour son intégrité et son attachement à la démocratie.
Education
Issu d'une famille modeste, Sékouba Konaté a grandi dans la commune de Kaloum à Conakry. Dès son plus jeune âge, il a été marqué par la fermeté de son père, le commandant Doubany Konaté, qui lui a inculqué des valeurs de discipline et de rigueur. Après des études secondaires, il intègre en 1985 l'armée guinéenne, poursuivant sa formation militaire à l'étranger.
En 1996, il suit les cours du Brevet de chef de section Parachutiste à Pau en France, ainsi que des formations d'entraînement du 1er degré à Mont-Louis. Sa soif d'apprendre le conduit ensuite à l'école de Guerre en Chine, où il approfondit ses connaissances stratégiques et tactiques.
Formation militaire
La formation militaire de Sékouba Konaté a été riche et diversifiée, lui permettant d'acquérir une solide expérience sur le terrain. Après avoir intégré l'armée guinéenne en 1985, il gravit progressivement les échelons jusqu'à devenir commandant-adjoint du Détachement des parachutistes à Labé en 1996, nommé par le président Lansana Conté lui-même.
Entre 2000 et 2002, Konaté gagne en popularité en participant à des opérations le long des frontières avec le Liberia et au sein de la Mission des Nations Unies en Sierra Leone (MINUSIL). C'est à cette période qu'il obtient le surnom de "Tigre" en raison de sa férocité au combat.
Carrière militaire
La carrière de Sékouba Konaté connaît un tournant décisif en 2008 lorsqu'il est nommé commandant du prestigieux Bataillon autonome des troupes aéroportées (BATA), l'unité d'élite de l'armée guinéenne basée au camp Alpha Yaya Diallo. Sa mission est alors de mettre fin aux soulèvements répétés au sein des troupes entre 2007 et 2008.
Le 23 décembre 2008, à la suite du décès du président Lansana Conté, Konaté est l'un des principaux instigateurs du coup d'État militaire qui porte le capitaine Moussa Dadis Camara au pouvoir. Nommé général de brigade et ministre de la Défense au sein du Conseil national pour la démocratie et le développement (CNDD), la nouvelle junte, Konaté semble dans un premier temps soutenir Camara.
CNDD
Cependant, les relations entre les deux hommes se dégradent rapidement après le massacre du 28 septembre 2009, perpétré par les forces de sécurité contre des manifestants de l'opposition rassemblés au stade de Conakry. De retour d'un déplacement à Nzérékoré, Konaté prend ses distances avec Camara et tente, en vain, de faire arrêter le présumé responsable du massacre, Aboubacar Diakité.
Le 3 décembre 2009, alors que Konaté est au Liban, Diakité ouvre le feu sur Camara et le blesse grièvement. Hospitalisé au Maroc, Camara est contraint à l'exil, laissant Konaté seul aux commandes en tant que président de la transition.
Evénements du 28 septembre 2009
Le massacre du 28 septembre 2009 restera comme l'une des pages les plus sombres de l'histoire récente de la Guinée. Ce jour-là, des milliers de manifestants pacifiques rassemblés au stade de Conakry pour réclamer le départ de Moussa Dadis Camara ont été la cible d'une violente répression de la part des forces de sécurité.
Selon les rapports des organisations de défense des droits humains, au moins 157 personnes ont été tuées et des centaines d'autres blessées. Des cas de viols collectifs et de pillages ont également été signalés. Face à l'ampleur du drame, Sékouba Konaté, alors ministre de la Défense, a tenté de prendre ses distances avec le régime Camara, mais en vain.
Ces événements tragiques ont profondément marqué l'opinion publique guinéenne et internationale, soulignant la nécessité urgente d'un retour à l'ordre constitutionnel et d'une transition démocratique apaisée.
Président de transition
Propulsé à la tête de l'État par les accords de Ouagadougou du 15 janvier 2010, Sékouba Konaté se retrouve avec la lourde tâche d'organiser des élections présidentielles libres et transparentes, les premières depuis l'indépendance du pays en 1958.
Conscient de ses lacunes en matière de gouvernance civile, il s'entoure de conseillers expérimentés comme Tibou Kamara, nommé ministre secrétaire général à la présidence. Konaté se concentre principalement sur les questions de sécurité, domaine dans lequel il excelle.
Malgré les tensions et les violences qui éclatent entre les partisans des deux finalistes, Alpha Condé et Cellou Dalein Diallo, Konaté parvient à mener à bien le processus électoral. Le second tour, initialement prévu pour 2010, est finalement reporté à 2011 en raison de difficultés logistiques.
Organisation des élections de 2010
L'organisation des élections présidentielles de 2010 a représenté un défi majeur pour le régime de transition dirigé par Sékouba Konaté. Après des décennies de régime autoritaire, il s'agissait d'organiser les premières élections libres et démocratiques de l'histoire de la Guinée.
Dès le départ, le processus a été entaché par des controverses, notamment concernant la constitution des listes électorales. Le premier tour, qui s'est tenu le 27 juin 2010, a été marqué par des irrégularités et des violences sporadiques.
Face aux contestations des résultats par les partisans des deux finalistes, Alpha Condé et Cellou Dalein Diallo, Konaté a dû reporter le second tour à plusieurs reprises. Finalement, ce n'est que le 7 novembre 2010, soit quatre mois après le premier tour, que les Guinéens ont pu se rendre aux urnes pour départager les deux candidats.
Malgré les tensions et les accrochages entre les deux camps, le scrutin s'est déroulé dans un climat relativement calme, sous l'œil vigilant des observateurs internationaux. Alpha Condé a finalement été déclaré vainqueur avec 53,5% des voix, marquant ainsi la fin de la transition.
Exil
Après avoir supervisé avec succès le processus électoral, Sékouba Konaté quitte la Guinée en décembre 2010 pour prendre ses nouvelles fonctions de haut-représentant de l'Union africaine à Addis-Abeba, en Éthiopie. Nommé par le président de la Commission de l'UA, Jean Ping, Konaté est chargé de l'opérationnalisation de la Force africaine en attente et de la planification stratégique des opérations de soutien à la paix.
Durant cette période, il séjourne plusieurs années à Addis-Abeba, mettant son expérience militaire au service de l'organisation panafricaine. Il enchaîne ensuite avec des séjours aux États-Unis et au Maroc, restant à l'écart de la scène politique guinéenne, avant de s'installer finalement en France en 2014.
Son exil volontaire prend fin en décembre 2021, lorsque la junte militaire au pouvoir en Guinée l'autorise, ainsi que l'ancien président Moussa Dadis Camara, à rentrer dans le pays. Le 24 décembre 2021, Konaté foule à nouveau le sol guinéen après 12 années d'absence, accueilli en héros par ses partisans à l'aéroport de Conakry.
Caractère
Au-delà de son parcours hors norme, c'est la personnalité atypique de Sékouba Konaté qui a marqué les esprits, tant en Guinée qu'à l'international. Décrit comme un homme discret, voire timide, le "Tigre" tranche avec l'image du militaire autoritaire assoiffé de pouvoir.
D'un naturel réservé, presque introverti, Konaté semble avoir été profondément marqué par les drames de son enfance, comme la perte précoce de ses parents. Ces épreuves l'ont peut-être rendu méfiant vis-à-vis des honneurs et conduit à rechercher une vie simple, loin des fastes du pouvoir.
Pragmatique et réaliste, il n'a jamais caché son empressement à quitter ses fonctions de président dès que possible, allant à l'encontre des habitudes des dirigeants africains. Son attachement à recouvrer sa liberté et son anonymat en disent long sur ses valeurs personnelles, bien loin des tentations de l'apparat présidentiel.
Vie privée
Peu de détails ont filtré sur la vie privée de Sékouba Konaté, conformément à son goût pour la discrétion. On sait qu'il est marié à Mariama Sako Hall Konaté et père de quatre enfants, avec lesquels il partage une existence modeste à Taouyah, dans la banlieue de Conakry.
Loin des fastes de la résidence présidentielle de Boulbinet, qu'il a brièvement occupée, Konaté semble avoir toujours privilégié les plaisirs simples : un intérieur sans prétention, les repas familiaux autour du "riz du pays", les loisirs tels que regarder la télévision ou surfer sur internet.
Célibataire endurci dans l'âme, il apprécie de pouvoir sortir librement, prendre un verre avec des amis sans être constamment entouré d'une garde rapprochée. Un mode de vie en totale adéquation avec l'homme effacé et posé qu'il a toujours été.
Conclusion
Le parcours hors norme de Sékouba Konaté en fait une figure respectée et admirée, bien au-delà des frontières de la Guinée. Militaire désintéressé par le pouvoir, il a su mener avec intégrité la délicate transition démocratique de son pays après des décennies de régime autoritaire.
Son attachement indéfectible aux valeurs républicaines, son souci constant de l'intérêt supérieur de la nation, ont largement contribué au succès du processus électoral de 2010 et à l'avènement d'un ordre constitutionnel apaisé. Pour ces raisons, de nombreux dirigeants africains et occidentaux lui ont témoigné leur estime et leur gratitude.
Aujourd'hui retiré de la vie publique, le "Tigre" de Guinée peut se prévaloir d'avoir montré qu'un autre type de leadership était possible en Afrique : sobre, désintéressé et totalement dévoué au bien commun. Un modèle malheureusement trop rare sur un continent encore trop souvent gangréné par les dérives autocratiques du pouvoir.