Djibril Tamsir Niane

Introduction

Djibril Tamsir Niane était un éminent écrivain, historien et universitaire guinéen connu pour son travail sur l'histoire et la tradition orale de l'Empire du Mali et du peuple mandingue. Sa contribution majeure, le livre "Soundjata ou L'épopée mandingue" publié en 1960, a fait connaître au monde entier l'épopée médiévale ouest-africaine de Soundiata Keïta, fondateur de l'Empire du Mali au 13ème siècle. Considéré comme un classique africain, cet ouvrage a été traduit dans plusieurs langues et est enseigné dans de nombreuses universités à travers le monde. Djibril Tamsir Niane a consacré sa vie à préserver et promouvoir le patrimoine culturel et historique de l'Afrique.

Enfance et Éducation

Djibril Tamsir Niane est né le 9 janvier 1932 à Conakry, en Guinée. Issu d'une famille modeste, il a grandi dans un environnement riche en traditions orales et en contes populaires qui ont nourri son intérêt précoce pour l'histoire et la culture africaines.

Après des études secondaires à Dakar au Sénégal, le jeune Djibril Tamsir Niane part poursuivre des études supérieures en histoire à l'Université de Bordeaux en France. Il en sort diplômé en 1959 avec une licence et un Diplôme d'Études Supérieures (DES) en poche. Son mémoire de DES portait sur l'Empire du Mali au Moyen Âge, thème qui allait devenir le fil conducteur de sa carrière d'historien.

Début de Carrière

De retour en Guinée après l'obtention de ses diplômes, Djibril Tamsir Niane commence à enseigner à l'Institut Polytechnique de Conakry. Passionné par l'histoire de son pays et du Mandé, il poursuit ses recherches sur l'épopée de Soundjata Keïta en collectant les récits oraux auprès des griots, notamment Mamadou Kouyaté. C'est à partir de ce travail de terrain qu'il rédige son œuvre majeure "Soundjata ou L'épopée mandingue" publiée en 1960 aux éditions Présence Africaine à Paris.

Enthousiasmé par la construction du nouvel État guinéen après l'indépendance, Djibril Tamsir Niane s'investit activement dans le domaine de l'éducation et de la recherche historique. Il codirige avec Jean Suret-Canale le premier manuel d'histoire africaine utilisé dans les écoles secondaires africaines.

Exil au Sénégal

Malheureusement, certains de ses écrits jugés trop critiques envers le régime de Sékou Touré lui valent la prison en 1961. Libéré en 1964, Djibril Tamsir Niane est contraint de s'exiler au Sénégal en 1972 où il rejoint l'Institut Fondamental d'Afrique Noire (IFAN) à Dakar en tant qu'enseignant.

Malgré son exil, il poursuit inlassablement son travail de collecte et de transcription des récits oraux des griots, contribuant ainsi à préserver la riche tradition orale africaine. Il est également invité à enseigner à l'Université Howard à Washington D.C. et à l'Université de Tokyo en tant que professeur émérite.

Historien

Aux côtés de Joseph Ki-Zerbo, Djibril Tamsir Niane codirige la publication du volume IV de l'Histoire Générale de l'Afrique sous l'égide de l'UNESCO, une contribution majeure à la documentation de l'histoire du continent africain.

Son expertise sur l'Empire du Mali et la civilisation mandingue fait de lui une référence internationale. Il publie de nombreux ouvrages académiques tels que "Recherches sur l'Empire du Mali au Moyen Âge" (1975) et "Histoire des Mandingues de l'Ouest" (1989).

Bibliothèque

Dans les années 1990, Djibril Tamsir Niane ouvre sa bibliothèque personnelle riche de milliers d'ouvrages achetés aux quatre coins du monde. Ce lieu devient un centre de documentation incontournable pour les universitaires et chercheurs guinéens et étrangers pendant plus d'une décennie.

Malheureusement, en février 2012, un incendie ravage partiellement cette bibliothèque, détruisant de précieux manuscrits, notes de recherche et œuvres d'art. Malgré ce drame, Djibril Tamsir Niane tente de reconstituer une partie de ce patrimoine à partir des éléments sauvés des flammes.

Œuvre

Au-delà de ses travaux académiques, Djibril Tamsir Niane s'est également illustré dans la fiction avec des recueils de nouvelles comme "Méry" (1975) et "Contes d'Hier et d'Aujourd'hui" (1985). Il a également écrit des pièces de théâtre historiques telles que "Sikasso, ou La Dernière citadelle" et "Chaka".

Son chef-d'œuvre reste cependant "Soundjata ou L'épopée mandingue", véritable classique de la littérature africaine qui relate les exploits de Soundiata Keïta, héros légendaire à l'origine de l'Empire du Mali au 13ème siècle.

Publications

Voici une liste non exhaustive des principales publications de Djibril Tamsir Niane:

• Soundjata ou L'Épopée mandingue (1960)
• Recherches sur l'Empire du Mali au Moyen Âge (1975)
• Méry (recueil de nouvelles, 1975)
• Contes d'Hier et d'Aujourd'hui (1985)
• Histoire des Mandingues de l'Ouest (1989)
• Contributions au volume IV de l'Histoire Générale de l'Afrique (UNESCO, 1991)
• Sikasso, ou La Dernière citadelle (théâtre, 1991)
• Chaka (théâtre, 1991)
• Contes de Guinée (2006)

Prix et Reconnaissances

Pour son immense contribution à la préservation et la promotion du patrimoine culturel africain, Djibril Tamsir Niane a reçu de nombreuses distinctions au fil de sa carrière:

• Membre honoraire de l'Association des Écrivains du Sénégal
• Secrétaire général de la Fondation Léopold Sédar Senghor
• Professeur honoraire de l'Université Howard (Washington D.C., États-Unis)
• Professeur honoraire de l'Université de Tokyo (Japon)
• Grand Prix Africain Yasser Arafat pour la Paix et la Liberté (2019)

Vie Privée

Djibril Tamsir Niane était le père de cinq enfants nés de son union avec Hadja Aissatou Diallo, originaire de Labé en Guinée:

• Daouda Tamsir Niane, journaliste devenu directeur de la Bibliothèque Djibril Tamsir Niane
• Katoucha Tamsir Niane, mannequin internationale décédée en 2008 après avoir publié un livre autobiographique
• Raliatou "Fifi" Tamsir Niane, actrice, réalisatrice et dramaturge
• Fatou Tamsir Niane, éditrice ayant travaillé pour les Nouvelles Éditions Ivoiriennes
• Bachir Tamsir Niane, professeur de lettres modernes et écrivain

En 2021, la vie de l'illustre Djibril Tamsir Niane a été tragiquement frappée par un douloureux coup du sort. Le 8 mars, il est décédé à l'âge de 89 ans à Dakar au Sénégal des suites de la Covid-19, après avoir été évacué pour recevoir des soins. L'ironie du sort a voulu que sa sœur jumelle Yayè Niane succombe à la même maladie quelques heures plus tôt à Conakry en Guinée.

La disparition de Djibril Tamsir Niane a été accueillie avec une immense tristesse dans le monde littéraire et universitaire africain. De nombreux hommages ont salué l'œuvre et l'héritage de celui que le président de l'Association des Écrivains du Sénégal Alioune Badara Bèye a qualifié de "gardien de la mémoire africaine".

Conclusion

La vie et l'œuvre de Djibril Tamsir Niane illustrent avec brio la mission qu'il s'était donnée: perpétuer la riche tradition orale et l'héritage historique de l'Afrique de l'Ouest. En collectant et retranscrivant les récits épiques des griots mandingues, notamment dans son chef-d'œuvre "Soundjata ou L'épopée mandingue", il a offert au monde un trésor culturel inestimable.

Son parcours d'historien, d'écrivain et d'universitaire a grandement contribué à sortir de l'ombre la civilisation africaine médiévale et à en faire reconnaître la valeur universelle. Djibril Tamsir Niane restera à jamais une figure de proue de la renaissance culturelle africaine, un passeur de mémoire dont l'empreinte demeure indélébile.

Aujourd'hui, son legs se perpétue à travers la Bibliothèque Djibril Tamsir Niane située à Conakry, véritable havre du savoir et de la connaissance qu'il avait tant chéri. Cet établissement, que sa famille souhaite voir obtenir le statut d'intérêt public, se dresse comme un phare pour les générations futures d'écrivains, d'intellectuels et de chercheurs africains.