Dans un pays en quête de stabilité et de démocratie, la Guinée se retrouve une fois de plus à la croisée des chemins. Trois ans après avoir renversé le premier président démocratiquement élu du pays, le General Mamadi Doumbouya, actuel président de la transition, semble prêt à trahir ses promesses et à se présenter aux élections présidentielles. Cette décision, si elle se concrétise, ne serait rien de moins qu'une trahison envers le peuple guinéen et une violation flagrante des principes démocratiques pour lesquels tant de Guinéens ont lutté.
Lorsque Doumbouya a pris le pouvoir en 2021, il s'est présenté comme un sauveur, promettant de restaurer la justice, la cohésion sociale et l'intégrité financière que le régime précédent avait, selon lui, sapées. Il s'était engagé solennellement à organiser des élections transparentes et inclusives, jurant que ni lui ni aucun membre de la transition ne se présenterait comme candidat. Cette promesse était inscrite dans la Charte de la Transition, un document qui devait guider le pays vers un avenir démocratique.
Aujourd'hui, la perspective de sa candidature aux élections présidentielles est une trahison pure et simple de ce serment. Elle démontre que les paroles prononcées n'étaient qu'un moyen de s'emparer du pouvoir, sans réelle intention de le rendre au peuple comme promis. Cette volte-face sape la confiance déjà fragile du peuple guinéen envers ses dirigeants et menace de plonger le pays dans une nouvelle période d'instabilité politique.
L'une des promesses phares de Doumbouya était de restaurer l'État de droit et l'indépendance de la justice. Cependant, son régime a rapidement montré des signes inquiétants d'instrumentalisation du système judiciaire à des fins politiques. L'incarcération prolongée sans jugement de figures politiques comme Kassory Fofana, Amadou Damaro Camara et Dr. Diane est un exemple flagrant de cette dérive. Ces détentions, qui s'apparentent à des règlements de comptes politiques, violent les principes fondamentaux de la présomption d'innocence et du droit à un procès équitable.
Cette utilisation abusive de la justice ne se limite pas aux opposants politiques. Elle s'étend également à la société civile, avec l'enlèvement d'activistes comme Fonike Mangue et Billo Bah. Ces actes de répression visent clairement à museler toute voix critique et à instaurer un climat de peur, rappelant les heures les plus sombres des régimes autoritaires que la Guinée a connus par le passé.
Ironiquement, l'une des principales justifications du coup d'État de Doumbouya était la lutte contre la corruption et la mauvaise gestion financière. Pourtant, sous son régime, ces fléaux semblent avoir pris de nouvelles proportions. La corruption généralisée gangrène tous les niveaux de l'administration, tandis que les détournements de fonds publics se poursuivent à un rythme alarmant.
Les mouvements de soutien à la candidature de Doumbouya, qui émergent partout dans le pays, sont souvent accompagnés de distributions d'argent, une pratique qui s'apparente à de l'achat de conscience à grande échelle. Cette utilisation des ressources de l'État à des fins personnelles est non seulement illégale mais aussi profondément immorale, privant le peuple guinéen des investissements cruciaux dont il a désespérément besoin.
Plus inquiétant encore est le traitement réservé aux dissidents au sein même de l'armée. Les cas d'arrestation, de torture et même d'assassinat de militaires dans les prisons, comme ceux de Sadiba Koulibali et Pepe Celestin, sont des violations flagrantes des droits humains les plus fondamentaux. Ces actes barbares, perpétrés contre ceux qui sont censés protéger la nation, témoignent d'un régime qui a perdu toute légitimité morale et qui règne par la peur plutôt que par le consentement.
Pendant que le régime de Doumbouya se concentre sur la consolidation de son pouvoir, la situation économique et sociale du pays ne cesse de se détériorer. La cherté de la vie atteint des niveaux insupportables pour la majorité des Guinéens, qui luttent quotidiennement pour joindre les deux bouts. L'inflation galopante érode le pouvoir d'achat, tandis que les opportunités économiques se font rares.
L'état des infrastructures du pays est tout aussi alarmant. La dégradation des routes entrave non seulement la mobilité des citoyens mais aussi le développement économique, isolant des régions entières et freinant le commerce. Les délestages fréquents d'électricité paralysent l'activité économique et compliquent la vie quotidienne des Guinéens, rappelant cruellement les promesses non tenues d'amélioration des conditions de vie.
La potentielle candidature de Doumbouya aux élections présidentielles représente un danger existentiel pour la jeune démocratie guinéenne. Elle perpétuerait un cycle vicieux où les dirigeants militaires s'emparent du pouvoir sous prétexte de redresser le pays, pour ensuite s'accrocher à ce même pouvoir par tous les moyens possibles.
Ce scénario, s'il se réalise, enverrait un message désastreux non seulement au peuple guinéen mais aussi à toute la région ouest-africaine : que les coups d'État et la trahison des promesses démocratiques peuvent être des moyens acceptables d'accéder et de se maintenir au pouvoir. Cela ne ferait qu'encourager d'autres aventuriers militaires à suivre le même chemin, plongeant la région dans une instabilité chronique.
Face à cette situation alarmante, il est crucial que la communauté internationale et, surtout, le peuple guinéen lui-même, se mobilisent pour exiger le respect des engagements pris lors de la transition. La Guinée a besoin d'une véritable transition démocratique, pas d'un simulacre d'élections visant à légitimer un pouvoir acquis par la force.
Les organisations de la société civile, les partis politiques d'opposition et tous les citoyens épris de démocratie doivent unir leurs forces pour résister à cette dérive autoritaire. Il est temps de rappeler à Doumbouya et à son entourage que le pouvoir appartient au peuple et que leur rôle est de faciliter un retour à l'ordre constitutionnel, pas de s'y accrocher indéfiniment.
La candidature probable de Mamadi Doumbouya aux élections présidentielles n'est pas un acte de patriotisme comme voudraient le faire croire ses partisans. C'est une trahison pure et simple des promesses faites au peuple guinéen, une violation de la Charte de la Transition et un pas de plus vers l'autoritarisme.
Cette situation met en lumière les défis profonds auxquels la Guinée est confrontée dans sa quête de démocratie et de bonne gouvernance. La corruption généralisée, l'instrumentalisation de la justice, les violations des droits humains et la détérioration des conditions de vie des citoyens sont autant de symptômes d'un système politique profondément dysfonctionnel.
Le peuple guinéen mérite mieux. Il mérite des dirigeants qui respectent leurs engagements, qui placent l'intérêt national au-dessus de leurs ambitions personnelles et qui travaillent sans relâche pour améliorer les conditions de vie de tous les citoyens. La Guinée a besoin d'une véritable transition démocratique, pas d'un nouveau dictateur en uniforme.
L'heure est venue pour tous les Guinéens de se lever et de dire non à cette trahison. De réclamer le respect de la Charte de la Transition et l'organisation d'élections libres, transparentes et inclusives où ni Doumbouya ni aucun membre de son gouvernement de transition ne se présenterait. C'est seulement ainsi que la Guinée pourra espérer briser le cycle de l'autoritarisme et s'engager sur la voie d'un véritable développement démocratique et économique.
Le destin de la Guinée est entre les mains de son peuple. Il est temps pour les Guinéens de se rappeler les luttes du passé, les sacrifices consentis pour la démocratie, et de refuser catégoriquement cette nouvelle tentative de confiscation du pouvoir. L'avenir de la nation en dépend, et chaque citoyen a un rôle crucial à jouer dans cette lutte pour la préservation des idéaux démocratiques et la construction d'une Guinée plus juste, plus prospère et véritablement libre.