Elhadj Demba Fadiga

Introduction

Dans le paysage socio-politique guinéen, certaines figures se distinguent par leur parcours exceptionnel et leur dévouement au développement de leur pays. Elhadj Demba Fadiga fait incontestablement partie de ces personnalités marquantes dont l'impact a transformé de nombreux aspects de la vie nationale. De son parcours académique remarquable à son engagement pour la chefferie traditionnelle, en passant par sa brillante carrière professionnelle et son implication politique, son itinéraire témoigne d'un attachement profond à ses racines et d'une vision claire pour l'avenir de la Guinée.

Origines et Education

Natif de Kindia, dans la région de la Basse Guinée, Elhadj Demba Fadiga a grandi dans une famille profondément religieuse où la foi et la discipline étaient les piliers du quotidien. Il est le petit-fils de Feu Karomoko Fodéba Fadiga, un homme fortuné qui entretenait une amitié intime avec l'illustre Alpha Yaya Diallo, figure historique de la Guinée.

Après avoir commencé ses études à Kindia, il poursuit sa formation au lycée 2 octobre avant d'intégrer l'université Gamal Abdel Nasser. Brillant étudiant, il en sort major de sa promotion en sciences administratives et comptables, ce qui lui vaut d'être immédiatement orienté vers l'enseignement. Il devient ainsi professeur de comptabilité et gestion à la faculté des sciences administratives et comptables, marquant le début d'un parcours professionnel qui s'annonce prometteur.

Carrière professionnelle

Le parcours professionnel d'Elhadj Demba Fadiga connaît un tournant en novembre 1981, lorsqu'un décret présidentiel le nomme inspecteur des services financiers et comptables stagiaire. Cependant, des conflits familiaux liés à l'héritage de son grand-père le poussent à s'expatrier. Comme il l'explique lui-même : « C'était très difficile à vivre, car la diffamation doublée de la délation était l'arme fatale qui attendait au tournant tous ceux qui sortaient leur 'tête de l'eau'. Nous qui avions réussi à percer, nous étions des cibles pour toutes sortes de tracasseries. »

Son exil le conduit en Côte d'Ivoire, où il rejoint la Société Commerciale des Ports de l'Afrique de l'Ouest (SOCOPAO). Débutant comme responsable du service débours, il gravit rapidement les échelons pour devenir chef de la comptabilité analytique et contrôleur de gestion. « La société comptait 1045 employés dont 45 cadres expatriés et locaux, et j'étais parmi eux malgré le fait que j'avais étudié en Guinée », souligne-t-il avec une légitime fierté.

Retour au pays

Vers la fin des années 80, alors que la guerre civile au Libéria fait de nombreuses victimes parmi les Guinéens et que le climat social en Côte d'Ivoire se détériore avec la montée de "l'ivoirité", Elhadj Demba Fadiga prend la décision de rentrer au pays. « J'étais bien intégré en Côte d'Ivoire, mais voir nos compatriotes périr au Libéria, doublé de menaces à peine voilées de certains adeptes de l'ivoirité m'ont poussé à revenir au pays », témoigne-t-il.

De retour en Guinée en 1990, il reprend son poste chez SOCOPAO Guinée à la demande de la direction générale basée à Puteaux (France). L'entreprise, qui traverse alors des difficultés financières, compte sur son expertise pour redresser la situation. « Mon objectif était de me lancer dans les affaires, mais la société a insisté pour que je reprenne du service en Guinée », explique-t-il.

La société, qui ne compte alors que 22 employés, est engluée dans des problèmes liés aux « tiers détentions ». Sous son impulsion, et malgré un environnement économique morose, l'entreprise connaît un redressement significatif. Cette période marque également le début de sa collaboration avec Vincent Bolloré, qui avait racheté la société Delmas, devenue par la suite S.D.V.

Intégré à cette nouvelle structure en tant que Responsable des Affaires Administratives et Financières de SOCOPAO Guinée, il participe activement à la fusion de plusieurs entités (Delmas, SOCOPAO, SAGA SOAEM) sous la bannière du groupe Bolloré. Cette restructuration donne naissance à Bolloré Africa Logistics, au sein de laquelle il poursuit sa carrière comme directeur des affaires maritimes et responsable de la qualité. « J'ai eu l'honneur d'occuper ce poste avec une grande considération, d'autant plus qu'en Afrique, nous n'étions que trois directeurs des affaires maritimes », précise-t-il.

Pour se préparer à ces nouvelles responsabilités, il bénéficie de nombreuses formations à l'international : en anglais au Ghana, en technique commerciale et shipping à Etretat (France), en management à Saint Germain en Laye (France), et en shipping à Séoul, Hong Kong et Taipei.

Engagement au service du développement

Parallèlement à ses fonctions au sein du groupe Bolloré, Elhadj Demba Fadiga occupe successivement plusieurs postes stratégiques : président de l'AGEMAP-BMOP (Association guinéenne des entreprises manutentionnelles du port autonome de Conakry et Bureau de la main d'œuvre portière), membre du conseil d'administration du port autonome de Conakry, et vice-président de l'Agence guinéenne de consignataires maritimes (AGUICOM).

Son dévouement et ses services rendus à la nation lui valent d'être nommé ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire, et d'être décoré commandeur de l'ordre national du mérite de la République de Guinée en 2008.

Chefferie traditionnelle en Basse-Guinée

L'une des contributions majeures d'Elhadj Demba Fadiga à la société guinéenne réside dans son rôle déterminant pour la restauration et la reconnaissance de la chefferie traditionnelle en Basse-Guinée. Constatant le vide institutionnel et coutumier laissé par la suppression de cette institution sous la Première République, il s'engage à recréer un cadre d'encadrement pour la jeunesse.

« J'ai pensé qu'il fallait un cadre en Guinée, surtout en Basse-Guinée, un cadre coutumier qui puisse offrir une orientation à la jeunesse afin qu'elle ne divague pas, faute d'encadrement », explique-t-il. « La suppression de la chefferie traditionnelle a eu un impact principalement en Basse Guinée, car ailleurs, les sotikemo sont restés en place. Mais ici, étant le siège du pouvoir, la chefferie a été supprimée, laissant place à un vide institutionnel et coutumier. »

Désigné président de l'association des ressortissants de Kindia, fonction qu'il exercera pendant 25 ans, il œuvre au développement de sa région natale à travers de nombreuses réalisations : bitumage des 12 premiers kilomètres de route, fourniture de médicaments essentiels pour lutter contre le choléra, réalisation d'une dizaine de forages dans la commune urbaine, lobbying pour la construction du pont de Madina-Oula, construction de la route Tabily-Fossikhouré avec plusieurs ouvrages de franchissement, couverture réseau téléphonique de zones isolées, don d'un mini-bus aux personnes porteuses de handicap, remise d'une ambulance à Molota, et fourniture d'un bateau de plaisance à Samaya pour réduire les noyades.

S'inspirant de la structure de la chefferie traditionnelle en Côte d'Ivoire, il prend l'initiative d'installer un Kountigui à Kindia. Sous le régime du général Lansana Conté, il organise l'intronisation du premier Kountigui de Kindia, Elhadj Momo dit Damodou. Cette initiative fait école et conduit à l'intronisation d'Elhadj Sékhou Ismaël Soumah comme Kountigui de la Basse Guinée, avec la bénédiction des sages, khalifs et imams de la région.

Après le décès de ce dernier, et malgré les prétentions du respecté général Facinet Touré, c'est Elhadj Sékhouna Soumah de Tanènè qui est désigné Kountigui, tandis que le général Facinet Touré accepte la fonction de Médiateur de la République. Elhadj Demba Fadiga préside alors le comité d'organisation de l'intronisation à Kindia. La notion de Kountigui se consolide et évolue pour devenir aujourd'hui Kountiguigbé avec la terminologie soboti.

En septembre 2016, à la demande du Kountigui, il réunit un collège d'une quinzaine de cadres issus de toutes les préfectures de la Basse-Guinée pour rédiger la charte du Kountiguiya, institutionnalisant ainsi cette autorité traditionnelle.

Engagement politique

L'engagement d'Elhadj Demba Fadiga pour sa région natale le conduit naturellement vers la politique. « Les populations de Kindia estimaient qu'il était inconcevable d'aller chercher un député ailleurs », raconte-t-il. Il est ainsi coopté par le RPG (Rassemblement du Peuple de Guinée) pour être candidat à la députation, bien qu'il n'appartienne pas à ce parti. « Ce n'était pas par vocation politique, mais un choix qui s'est imposé à moi », précise-t-il.

Élu député uninominal de Kindia, il assume la présidence de la commission Aménagement du territoire, Énergie, Transports et Travaux publics à l'Assemblée nationale. À ce poste stratégique, il bénéficie de la confiance du président de l'Assemblée et de ses pairs, et joue un rôle déterminant dans plusieurs projets d'envergure : réalisation des plans architecturaux de l'Assemblée nationale, projets hydroélectriques de Kaleta et Souapiti, route nationale n°1 Coyah-Dabola, entre autres.

« J'ai été l'interface avec la Chine, bien sûr avec la supervision des cadres du ministère de la Coopération pour obtenir le financement et faire venir quinze ingénieurs chinois de l'Université de Tongi », témoigne-t-il concernant le projet de construction du siège de l'Assemblée nationale. « Nous avons travaillé jour et nuit pendant deux semaines pour concevoir le plan du siège. »

Bilan législatif

Durant son mandat de député, Elhadj Demba Fadiga a activement participé à l'examen et l'adoption de près de 300 textes de loi, accords, conventions et traités. Parmi les plus significatifs figurent :

• La loi autorisant la ratification du contrat de financement de 60 millions de livres pour la réhabilitation de quatre centrales hydroélectriques à Kindia
• La loi portant Code de la Construction et de l'Habitation
• La loi autorisant la ratification de l'accord de prêt pour le projet des travaux de modernisation du réseau électrique de Conakry
• La loi portant protection du patrimoine routier national
• L'accord de prêt préférentiel pour le financement du projet de barrage hydroélectrique de Souapiti
• L'accord de prêt pour le financement de la construction d'ouvrages routiers à Conakry
• L'accord pour la réhabilitation de la route Kissidougou-Guéckédou-Kondébadou
• L'accord pour le financement du projet d'assainissement de la ville de Conakry
• L'accord pour le financement du projet d'interconnexion électrique Guinée-Mali
• Le contrat de fourniture d'énergie électrique pour Conakry
• Plusieurs textes fondamentaux : Code de l'aviation civile, Code de la route, Code maritime, etc.

En reconnaissance de sa contribution remarquable aux travaux de l'Assemblée nationale, il est désigné Point Focal pour la construction du siège de l'institution parlementaire financé par la République Populaire de Chine, un projet d'un montant de 39 millions de dollars.

Actions pour Kindia

En parallèle de son activité législative, Elhadj Demba Fadiga poursuit son engagement en faveur du développement de Kindia à travers de nombreuses initiatives :

• Lobbying pour la reconstruction de la route Tabili-Simitya dans la sous-préfecture de Mambiya
• Lobbying pour la couverture téléphonique de Takhoubéyah
• Lobbying pour l'électrification de plusieurs sous-préfectures
• Prise en charge des frais d'études de la route communautaire Madina Oula Centre-Souguéta
• Lobbying pour le bitumage supplémentaire de la ville de Kindia
• Facilitation de l'installation de la société des bauxites de Guinée dans la zone de Garafiri
• Assistance à la société Ashapura dans la prospection bauxitique
• Lobbying pour l'organisation des festivités de célébration de la fête de l'indépendance nationale à Kindia

Il a également fait divers dons matériels : une ambulance à la sous-préfecture de Molota, un bus aux personnes handicapées de Kindia, un bateau de plaisance à la sous-préfecture de Samaya, une voiture à sa suppléante, des poteaux en béton pour le réseau électrique de certains quartiers, et la construction de dix forages dans divers lieux publics et établissements.

Vision pour l'avenir de la Guinée

Interrogé sur la transition politique actuelle en Guinée, Elhadj Demba Fadiga se montre optimiste : "La transition actuelle présente des atouts très importants pour le développement socio-économique de notre pays par rapport aux transitions passées. Même si quelques petites anomalies inhérentes à toute œuvre humaine sont à corriger, le positif l'emporte sur le négatif. Ceci est palpable dans le contexte macroéconomique et dans la réalisation des infrastructures d'intérêt public, sans oublier les avantages sociaux pour les travailleurs, les artistes et les personnes porteuses de handicap."

Son appel à la nation résonne comme un testament politique : "Je lance un appel aux fils et aux filles de ce pays qui nous est cher pour que, dans le pardon et la cohésion sociale nous puissions faire de ce pays un modèle de développement global dans l'intérêt de tous."

Conclusion

Le parcours d'Elhadj Demba Fadiga illustre parfaitement le destin d'un homme qui a su mettre ses compétences et son influence au service du développement de son pays. De ses débuts comme brillant étudiant à son rôle de premier plan dans la renaissance de la chefferie traditionnelle, en passant par sa carrière internationale et son engagement politique, il a laissé une empreinte indélébile sur la Guinée contemporaine.

Son leadership visionnaire, sa résilience face aux adversités et son dévouement inlassable à la cause du développement font de lui une figure inspirante pour les générations actuelles et futures. À travers son œuvre multiforme, Elhadj Demba Fadiga incarne l'esprit d'un patriote authentique, profondément attaché à ses racines et résolument tourné vers l'avenir.